La question des transports publics est centrale. Alors que la congestion urbaine est chaque jour plus évidente, alors que les investissements routiers ne constituent plus une priorité de l’Etat et des collectivités, alors que chaque commune, à son petit niveau, restreint drastiquement les possibilités de circulation individuelle pour préserver la tranquillité de ses citoyens-électeurs (sus au trafic de transit), la solution passe nécessairement par le développement des transports publics.
Dans le cadre du Grand Paris, deux grands projets étaient face à face avec des logiques différentes (cf notre article du 15 octobre 2009 « Le Grand Paris et nous (3) : Les transports publics au cœur du projet »). http://louveciennestribune.typepad.com/media/2009/10/le-grand-paris-et-nous-3.html
D’un côté, le projet du gouvernement, porté par la Société du Grand Paris (SGP) qui proposait un métro automatique sur un tracé d'une longueur totale de 155 km et qui devait relier neuf pôles «stratégiques» (Roissy, Le Bourget, Marne-la-Vallée, Villejuif, Orly, Massy, Saclay, La Défense, Saint-Denis-Pleyel).
D’un autre côté, Arc Express, défendu par la Région (et le Syndicat des transports de l’Ile-de-France, STIF) se présentait comme une rocade de métro en proche couronne avec comme objectif de « désaturer Paris » et de faciliter les déplacements de banlieue en banlieue (avec réduction de la part de la voiture).
De la controverse au consensus
Après des mois de polémiques et de débats publics intenses (1), Maurice Leroy, ministre de la Ville chargé du dossier du Grand Paris (à la suite de Christian Blanc) et Jean-Paul Huchon, président du Conseil régional d'Ile-de-France et président du STIF sont parvenus à s’entendre en signant le 26 janvier 2011 un protocole d’accord mettant sur les rails un « Grand Paris Express », hybride né de la fusion des deux projets concurrents.
Dans la foulée, un comité de pilotage (2) a travaillé quatre mois pour finaliser un schéma d’ensemble comportant notamment un tracé définitif et l’emplacement des gares ainsi que des règles de coordination entre le STIF et la SGP. Et c’est ainsi que le 26 mai 2011, le conseil de surveillance de la SGP a adopté un « avis motivé » sur ce schéma. Le tracé fera ensuite l’objet d’un décret, en juillet, qui, après enquête publique, donnera le coup d’envoi aux travaux.
Tracé définitif et emplacement des gares
Le schéma est issu du dossier de la SGP. Nous avons mis en annexe des présentations plus parlantes.
Le schéma d’ensemble se compose de trois lignes de métro automatique de 175 km et de 57 gares nouvelles (sur un total de 72 gares, 82 gares si l’on tient compte des variantes).
* Une ligne rouge Le Bourget – Chelles - Villejuif – La Défense – Gonesse – Roissy / Le Mesnil-Amelot de 95 km et 40 gares. Elle devra assurer des déplacements de banlieue à banlieue efficaces, sans avoir à transiter par le centre de Paris et sera en correspondance avec l’ensemble des lignes ferroviaires radiales qu’elle croise.
* Une ligne bleue Orly – Saint-Denis Pleyel de 30 km, dont environ 9 km correspondent à la ligne 14 actuelle (Saint-Lazare – Olympiades) et 6 km au prolongement entre St-Lazare et Mairie de Saint-Ouen et 12 gares nouvelles. Elle devra assurer la liaison entre Paris, le pôle de Saint-Denis Pleyel au nord et la plate-forme d’Orly au sud. Elle sera en correspondance avec les deux autres lignes du réseau du Grand Paris à Saint-Denis Pleyel, Villejuif et Orly.
* Une ligne verte Orly – Versailles – Nanterre de 50 km et 13 gares. Elle reliera la plate-forme d’Orly, au sud, à Versailles et contribuera au développement du plateau de Saclay. Elle sera ensuite prolongée au nord en direction de Rueil et Nanterre, de manière à offrir une liaison en rocade performante en moyenne couronne pour le sud, l’ouest et le nord-ouest parisiens.
Les gares en correspondance, 44 des 57 gares nouvelles, sont en correspondance avec le réseau de transport en commun existant ou projeté, 7 gares sont en correspondance avec le réseau à grande vitesse (TGV).
Les caractéristiques du métro
Le réseau de transport du Grand Paris sera exploité en mode métro automatique.
Sur la ligne rouge, le matériel roulant à grand gabarit sera sur roulement fer ; la vitesse commerciale se situera entre 60 et 65 km/h.
La ligne bleue sera une ligne sur pneu comme la ligne 14 actuelle avec une vitesse commerciale estimée à 45 km/h.
La ligne verte sera exploitée par un métro à capacité adaptée avec une vitesse commerciale supérieure à 65 km, ce qui portera le centre du plateau de Saclay à 30 mn de Paris.
Selon les estimations, le réseau sera fréquenté par 2 millions de voyageurs/jour à son achèvement.
Des incertitudes surtout financières
Tous les grands projets portent en eux des incertitudes. Il en sera de même du « Grand Paris Express ». Les aspects techniques ne sont actuellement pas totalement réglés (par quels morceaux commencer, quelle sera la longueur des quais,…) mais ils le seront. En revanche, les prévisions financières reposent sur des hypothèses, forcément sous-estimées et que l’Etat perclu de dettes ne pourra peut-être pas assumer. En effet, l’ensemble du projet représente 32 milliards € financés par la région Ile-de-France, les collectivités et l'État. Ce montant est dédié au réseau lui-même à hauteur de 20,5 milliards €, auxquels s'ajoutent 12 milliards € consacrés à l'amélioration des infrastructures existantes (3).
On terminera sur une note positive. Ce grand projet repose sur un accord entre la Gauche et la Droite ce qui évitera dans le futur, à l’occasion d’alternances, sa remise en cause totale.
Dans le prochain article de cette série intitulé « Les oubliés du Grand Paris Express », nous examinerons la situation des habitants de Louveciennes et de ses environs face à ce grand projet.
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(1) On remarquera que si le débat porté par les élus a été intense en Seine-Saint-Denis et dans l’est parisien, une discrétion, confinant au désintérêt, a été la règle dans notre secteur (à l’exception d’un petit frémissement à Versailles).
(2) Le comité de pilotage issu de l'accord Etat-Région du 26 janvier est composé des présidents des conseils régionaux d'IdF, du président de l'Association des maires d'IdF, du président de Paris-Métropole et du président du conseil de surveillance de la société du Grand Paris (SGP).
(3) Les 20,5 milliards du nouveau réseau de métro se décomposent en trois parties : 17,5 milliards sont alloués à la rocade qui entourera la capitale, 1 milliard est consacré au prolongement de la ligne 14 et, enfin, 2 milliards serviront à réaliser l'Arc Est proche (allant de Saint-Denis à Champigny et à Noisy via Rosny-sur-Seine). Pour réunir ces fonds, la SGP compte sur une dotation d'État de 4 milliards €. Les taxes spéciales sur les équipements et les taxes sur les bureaux et les entrepôts rapporteront 5 milliards €. L'impôt forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) permettra d'ajouter 1 milliard dans l'escarcelle. Les collectivités verseront 900 millions €. La SGP recueillera également quelques centaines de millions de redevances versées par les opérateurs ferroviaires pour l'utilisation du réseau. Enfin, la SGP lancera un emprunt pour près de 9 milliards €, auxquels s'ajouteront les frais financiers.
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Des présentations plus attrayantes du tracé