Analyse
Une échéance délicate attend le maire de Louveciennes, André Vanhollebeke, et son équipe municipale : porter à terme le plan local d’urbanisme (PLU) en dépit de l’existence de certains obstacles.
Le 7 juillet dernier, le conseil municipal a adopté le projet du PLU (1). Il est maintenant soumis pour avis aux « personnes morales concernées » (notamment l’Etat) puis aux Louveciennois qui pourront donner leur opinion à un commissaire-enquêteur. Le document du PLU est sur la table, plus précisément il est accessible à tous sur le site Internet de la mairie (http://www.mairie-louveciennes.fr). Il faut saluer à cet égard le bel effort de transparence dont fait preuve l'équipe municipale.
Le PLU se présente comme un document très riche (un peu plus de 660 pages) dont l’analyse est néanmoins délicate. « Le diable se niche souvent dans les détails ». Le choix stratégique qui conditionne tous les autres est la construction, dans les 15 à 20 ans à venir, de plus de 500 logements sur le territoire de la commune avec comme conséquence un apport estimé à 1 500 habitants de plus (venant s’ajouter aux 7 400 habitants actuels). Cette densification accrue (qui ne s’arrêtera d’ailleurs pas aux limites de Louveciennes puisque les communes aux alentours seront engagées dans la même problématique) aura de multiples conséquences notamment en termes de déplacement, d’équipements et de services publics.
Deux interrogations
On utilise beaucoup dans les documents du PLU les concepts de « ville courte distance », de « circulation douce », ce qui est parfaitement en phase avec les préoccupations de l'époque. Mais on oublie un peu trop allègrement la topographie de Louveciennes marquée par une forte déclivité, le caractère non extensible de la voirie actuelle, l’insuffisance criante des places de stationnement (publiques mais surtout privées).
Villevert, chance ou menace
La deuxième interrogation porte sur le devenir de Villevert. C’est un dossier que nous avons déjà abordé ici à maintes reprises (2). La municipalité destine ce site à l’activité économique ; le PLU prévoit pour ces terrains des bureaux mais également des commerces, de l’hôtellerie, des activités de loisirs... L’État n’est pas de cet avis et souhaite que ces terrains accueillent prioritairement des logements. Cette position de l'État s’inscrit dans le cadre des choix stratégiques qu’il a fixé en région parisienne. « Les pôles d'excellence économique » dans le Grand Paris se situeront à l'avenir notamment dans le nord et l'est parisien et pour ce qui est de l'ouest, le développement se fera du côté de Saclay, de Saint-Quentin-en-Yvelines, et plus proche de nous, à Versailles, sur le terrain de Satory.
Si l’Etat et la commune sont des acteurs importants, il convient de ne pas oublier que les terrains de Villevert appartiennent à un propriétaire privé, Louveciennes-Développement, qui n’a pas démontré jusqu’à présent qu’il était un opérateur de qualité, disposant des compétences techniques et de la surface financière pour mener à terme un grand et beau projet ; il cherche avant tout à tirer le maximum d’un terrain acquis fort cher grâce à de l’argent du Moyen-Orient attiré en échange de la promesse d’une rentabilité élevée (3).
Les cartes des différents acteurs
Examinons les cartes dont disposent les différents acteurs du dossier.
La commune de Louveciennes ne dispose pas de la pleine maîtrise foncière de la plaine de Villevert ; elle n’a pas la surface financière requise, ni l’expertise. Et pour le moment, à l’échelle du département et de la Région, on ne relève pas encore l’existence d’une volonté appuyée par des moyens financiers appropriés.
Louveciennes n’est cependant pas dénuée de moyens. Elle a la possibilité d’encadrer les initiatives de tout opérateur par le Plan local d’urbanisme (PLU) et par l’attribution du (des) permis de construire, ce qui n’est pas rien.
Louveciennes-Développement, héritière du permis de construire accordé à Canal+, a échoué à y implanter des bureaux et a finalement renoncé à son permis. Dans une situation financière délicate, la société attend avec impatience la publication du PLU qui permettra au site de Villevert de s’ouvrir largement aux commerces. Mais de quels commerces parle-t-on ? S’agit-il d’une excroissance de Parly II ? S’agit-il de commerces « bas de gamme » avec leur empilement de boîtes à chaussure aux couleurs agressives, …telles qu’on peut les voir en longeant la RN12 entre Trappes et Coignères ou encore à Orgeval ? Le PLU pourra certes afficher de hautes exigences architecturales et environnementales mais nul doute que les pressions émanant des Cofirama, Midos et autres Pizzashot seront très fortes. …. Le périmètre de protection du château de Versailles pourra nous protéger en matière de hauteurs d’immeubles mais plus difficilement contre le déferlement de la laideur commerciale (4).
On connaît les intentions de l’Etat mais on ne dispose encore de peu de précisions sur le nombre et le type de logements souhaités sur le site. On parle de 1 000 à 1 500 logements, ce qui apporterait 3 000 à 4 000 habitants supplémentaires et ferait indiscutablement basculer la commune de Louveciennes dans une autre dimension. On comprend donc parfaitement les fortes réticences du maire et de son équipe municipale devant une telle évolution.
Si un avis défavorable du PLU était donné par l’Etat cela pourrait remettre en cause nombre d’options prévues (et notamment celle de la densification sur le périmètre actuel). Dans ce cas deux possibilités s’offrent au maire : repousser l’adoption du PLU pour étudier les arguments et les propositions de l’Etat ou, sûr de la justesse de ses positions, choisir « un passage en force ». Nous n’en sommes pas là. On attendra donc sagement l’avis de l’Etat (et ses attendus) prévu dans les prochaines semaines.
FK
(1) Sous le titre, « Le conseil municipal arrête le nouveau plan d’urbanisme », nous avons consacré en juillet 2011 trois articles à la séance du conseil du 7 juillet 2011.
(2) Voir notamment :
« Quand le sous-préfet se mêle de Villevert» - 5 février 2010
http://louveciennestribune.typepad.com/media/2010/02/quand-le-sous-préfet-se-mêle-de-villevert.html
(3) Selon les comptes arrêtés au 31 décembre 2009 (derniers chiffres connus), l’investissement de Louveciennes-Développement s’établit à cette date à plus de 84 M€ soit 57,2 M€ (prix d’acquisition du terrain) + 3,2 M€ (désamiantage du terrain) + 24,0 M€ (charge d’intérêts).
(4) D’aucuns diront, avec raison, que les bâtiments de Bull étaient d’une laideur consternante mais ce n’est pas une raison de continuer dans cette direction.