Petite leçon d’économie

(Richard Serra – Aix 2008)

Dans les années quatre vingt dix/deux mille, a été lancé un grand programme de rénovation des ascenseurs dans les immeubles collectifs. Si un des objectifs était de soumettre les ascenseurs à des normes plus élevées (en termes de sécurité, d’économies d’énergie…), les pouvoirs publics ont également annoncé à grands coups de trompettes que ce grand chantier allait créer des dizaines de milliers d’emplois en France.

Un cas d’école

Nous livrons à la sagacité de nos lecteurs, le cas d’une copropriété de notre commune qui a rénové, selon les normes les plus élevées, la totalité de ses ascenseurs.

Le matériel est venu de Finlande ; l’origine étrangère de ces ascenseurs n’est pas étonnante car le nombre de grands fabricants est limité.

Les ascenseurs ont été débarqués à Hambourg (Allemagne), vraisemblablement parce que les ports allemands sont plus efficaces et sûrs que les ports français. (*)

De Hambourg, le matériel a été transporté par la route en Région parisienne par un transporteur allemand.

Arrivés à Louveciennes, le montage des ascenseurs a été assuré par des spécialistes, un serbo-croate et un turc, hommes de grande expérience, ils venaient de faire des chantiers d’ascenseurs à Pékin à l’occasion des Jeux Olympiques.

Avant d’installer les nouvelles cabines, quelques coups de marteaux piqueurs ont été nécessaires pour élargir les conduits. Ce travail a été réalisé par des hommes d’Afrique noire, immigrés de fraîche date.

Rassurons-nous, les contrats ont été signés par du personnel français des Agences commerciales de la marque, les révisions périodiques étant assurés par du personnel français ou étrangers, installé en France.

Quelques observations 

• Au cours du débat sur la Constitution européenne, des politiciens ont agité le spectre du « plombier polonais » pour inciter les Français à voter « Non ». Ils ont réussi dans leur entreprise. Le signataire de ces lignes confesse par ailleurs que deux Polonais (un ancien, un jeune) ont installé, d’une manière totalement satisfaisante, avec efficacité, des doubles vitrages des fenêtres de son appartement. La facture de leur travail a été établie par une société française (non, il ne s’agissait pas de travail au noir…).                                 

Dans les propos qui précèdent, il n’est absolument pas question  de faire un quelconque procès aux ouvriers ou techniciens étrangers ou immigrés. Ils contribuent hautement, notamment dans le cas d’espèce, à apporter de «la valeur ajoutée». On y verra pas non plus un exemple à l’appui des thèses protectionnistes, la mondialisation (à condition qu’elle soit mieux régulée et que la France soit plus compétitive) est préférable.

La coexistence entre d’un côté trois millions de chômeurs et l’appel croissant à des travailleurs étrangers est un fait. Les raisons explicatives en sont complexes et nous n’essaierons pas dans cette courte chronique de les démêler.

La seule contradiction que nous voulions mettre en évidence est celle existant d’une part, entre les promesses des pouvoirs publics qui à chaque mesure, par exemple sur les économies d’énergie, chiffrent les emplois potentiels d’emplois propres à faire baisser le chômage et d’autre part, la réalité. Cherchez l’erreur.

 FK

(*) On pourrait également arguer du fait que la route maritime entre la Finlande et l’Allemagne est plus courte mais quand on connaît la faiblesse des prix du fret maritime, on ne comprend pas pourquoi le port de débarquement n’a pas été Le Havre.