La Chambre régionale des comptes d’Ile-de-France (CRC IdF), saisie par le Préfet des Yvelines à la suite du refus du budget 2021 par le conseil municipal de Louveciennes, vient de faire ses propositions budgétaires.
(La Chambre régionale des comptes d’Ile-de-France, Noisiel, Seine et Marne- Photo Cour des comptes)
L’avis, délibéré le 27 mai 2021, a été transmis au Préfet chargé de rendre le budget de la commune exécutoire.
Cet avis comporte 11 pages dont 4 pages de tableaux. Comme cela figure dans le code cet avis devait faire l’objet d’ « une publicité immédiate » par les soins du maire de Louveciennes ce qui a été fait. Il est ainsi accessible à toute personne sur le site de la Ville (1).
Par rapport au projet initial du maire, les propositions budgétaires de la CRC conduisent à une réduction des dépenses « réelles » de fonctionnement de 0,750 M€ (- 5,1 %) et d’investissement de 2,317 M€ ( - 37,1 %).
La lecture de l’avis est loin d’être un exercice facile
Noyé sous une litanie de cinquante considérants, il est souvent difficile de démêler les raisons qui ont conduit à la soustraction de certaines dépenses ou de certaines recettes. Apparemment alors qu’une « motivation explicite » est demandée au Préfet s’il s’écarte des propositions de la CRC, cette exigence n’est pas systématiquement remplie par les magistrats de la CRC d’Ile-de-France. Rendu curieux par cette pratique, nous avons consulté l’excellent site internet de la Cour des comptes, et là le premier avis qui nous est tombé sous les yeux (Avis du 19 mai 2021 de la CRC Auvergne Rhône-Alpes relatif à la commune de Neuvy) nous a montré qu’on pouvait faire nettement mieux : les motifs sont solidement argumentés, le texte est clair et précis (2).
Pour illustrer les difficultés d’interprétation des décisions de la CRC IdF, on retiendra d’abord celle relative aux investissements qui ont subi le coupes les plus franches.
« CONSIDÉRANT que le chapitre 21 « immobilisations corporelles » comprenant les travaux liés aux reprises de concession, à l’affaissement du sol de l’école Doumer et à la toiture, les travaux de mise aux normes de l’office de restauration scolaire, de la maison médicale et de mise aux normes incendie, aux travaux de sécurisation liés aux brise-vue école, à la porte du garage du bâtiment de la police municipale, à la vidéoprotection et aux armes pour la police municipale s’élève à 2.587.673 € ; »
Les propositions budgétaires présentées par le maire-adjoint aux Finances, Lyderick Watine, le 15 avril dernier, portaient sur 4.738.975 € ; c’est par déduction, et avec difficultés, qu’on a pu relever que des investissements n’ont pas été retenus, comme la création du terrain de foot à 5, les travaux d’accessibilité dans les écoles et les bâtiments publics, l’élaboration du projet Site patrimonial remarquable, la rénovation de la voirie et de l’éclairage public,…
Marie-Dominique Parisot (opposition, VAL) a regretté que le rapport ne contienne pas le détail des opérations supprimées. Elle a demandé si la Mairie disposait d’un autre document sur lequel s’appuie sa communication. Lyderick Watine, maire-adjoint aux Finances, qui était le principal interlocuteur de la magistrate chargée d’instruire le dossier, a répondu par la négative.
Faut-il considérer qu’il existe un doute sur la sincérité des évaluations ? Des prévisions de dépenses insuffisamment documentées ?
On devra se contenter des considérations générales qui figurent dans l’avis : « les propositions en vue du règlement du budget non voté ont pour objet de doter la collectivité des crédits nécessaires à la conduite des affaires locales, et notamment d’assurer la continuité du service public ; en conséquence la chambre limite ses propositions à l’inscription des crédits nécessaires au financement des dépenses qui soit présentent un caractère obligatoire, soit sont déjà engagées, soit revêtent un caractère d’urgence, au regard de la sécurité, de la salubrité et de la continuité du service public, et qu’il lui appartient de proposer l’inscription des recettes permettant de financer ces dépenses. »
D’autres décisions interrogent.
Ainsi la suivante :
« CONSIDÉRANT que le chapitre 012 d’un montant de 6.014.880 € a bien été justifié par la commune par le tableau des effectifs et le tableau de simulation des dépenses de personnel pour 2021 »
Ce chapitre 012 concerne les charges de personnel, le poste le plus important des dépenses de fonctionnement. On apprend ainsi avec satisfaction que les évaluations sont bien justifiées et basées sur les documents de la commune. On fera observer que sont également prévus des créations de nouveaux postes. Ont-ils un caractère obligatoire ? Revêtent-ils un caractère d’urgence au regard de la sécurité, de la salubrité et de la continuité du service public ? On ne le saura pas.
Ou encore la suivante :
« CONSIDÉRANT (…) que le compte 653 relatif aux indemnités des élus doit être réduit de moitié à 66.520 € dans la mesure où les fonctions de maire, d’adjoint et de conseiller municipal sont gratuites conformément à l’article L. 2123-17 du code général des collectivités territoriales ; »
Certes les fonctions sont « gratuites » mais ces élus peuvent recevoir, en toute légalité, des indemnités dont le régime est réglementé notamment par des barèmes. Sur ce point également, les motifs de la réduction n’apparaissent pas clairement ; existerait-il des doutes sur la réalité des fonctions exercées. ?
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A ce stade, il paraît évident que le budget de la commune n’aurait jamais dû passer entre les mains de la CRC et du Préfet s’il n’y avait pas eu ces querelles de personnes qui empoisonnent l’atmosphère. Les divisions sont profondes et les conditions d’une recomposition avec une majorité stable ne sont pas réunies. Il reste à sortir par le haut, c’est-à-dire de nouvelles élections, pour permettre aux Louveciennois de choisir l’équipe qui gérera les affaires de la commune.
FK
Références :
(1) Avis de la CRC IdF du 27 mai 2021 > > https://www.ccomptes.fr/system/files/2021-06/IDA2021-06_0.pdf
(2) https://www.ccomptes.fr/fr/documents/55849